Tout le monde se souvient de Casimir, « le monstre gentil de l’Ile aux Enfants », cette émission populaire diffusée sur FR3 puis TF1, dans les années 1970 dont les 968 épisodes ont connu un extraordinaire succès. Et tout le monde a aussi en mémoire la bande-son de cette émission. Mais saviez-vous que son auteur n’est autre qu’ André ANELLI, résident turbiasque depuis près de vingt ans, que nous avons choisi pour notre sixième « Portrait du mois » ?
Le Surveillant Général: « André ANELLI, vous avez 10mn de retard. Vous passerez en Conseil de Discipline »
-« Mais, M’sieu, je viens à vélo et c’est mon premier retard! »
-« Veux pas savoir! »
André ne passera pas en Conseil. Le soir même, à 15 ans, il annonce à son père: « Je ne retournerai pas à l’école, mais je te promets de réussir le concours d’entrée au Conservatoire de Paris dans trois ans! ». Le père, ouvrier, accepte. Il est lui-même musicien amateur. Clarinette et saxo, il fait les bals du samedi soir; la mère, passionnée d’opéra, mêlait déjà ses larmes à celles d’André, alors âgé de 6 ans, en écoutant La Tosca… André apprend le trombone au Conservatoire de Grenoble. Passionné et surdoué. A 15 ans, il est premier trombone de l’orchestre d’ « Holiday on ice » pour les tournées d’été, avec noeud pap et costume noir.
A 18 ans, déjà premier prix du Conservatoire de Grenoble de trombone, il est reçu au Conservatoire de Paris, comme il l’avait promis à son père,. Il part pour la capitale. Seul. Bosse comme un malade. Ses cours terminés, il vient écouter les autres. Pour apprendre encore. Dort sur un lit de camp chez un copain, grenoblois comme lui. Ses repas: un steak haché affiché 0,90, et payé 0,90. Mais le boucher qui a tout compris, emballe tous les jours, un steak à 3,60 nettement plus nourrissant. André termine Premier Prix du Conservatoire de Paris de trombone. Le quotidien grenoblois « Le Dauphiné libéré » lui consacre un article. Il le découpe et l’envoie au Surveillant-Général de Grenoble avec ce simple mot: « Merci! »
Et sa carrière s’envole. Les enregistrements en studio s’enchaînent: il est le trombone d’ « Amsterdam » de Jacques BREL, de tous les premiers disques de Claude FRANCOIS, de Sylvie VARTAN, de France GALL, de Jacques REVAUX (« My way »). Mais dans la même journée, il est également dans l’orchestre du « Palmarès de la chanson » pour la télé, et le soir il joue au Lido ou au Moulin Rouge. Une vraie boulimie de musique. Côtoie tous les grands: Francis LAI, Vladimir COSMA, Michel LEGRAND, Joséphine BAKER, Line RENAUD, Loulou GASTE, André MANOUKIAN et bien d’autres encore. 80 concerts dans le monde: Québec, New-York, Montreux, Rome, Naples, Moscou, St. Petersbourg. Il monte l’Opéra CARMEN en Jazz à Vienne. Avec Dee Dee Bridgewater, s’il vous plaît ! 9000 spectateurs tous les soirs. Entre temps, André a créé son propre orchestre: « le Big Band », enseigné au Conservatoire de Musique de Grenoble, rencontré Aimé BARELLI, dirigé l’orchestre du Sporting à Monaco, épousé Bernadette, elle aussi 1er Prix du Conservatoire de Paris. Le son, très particulier qu’André sort de son trombone fait qu’il est extrêmement demandé par les plus grands. Et comme les agendas ne correspondent pas toujours, on fait avec. C’est ainsi qu’il enregistre en Suisse, casque sur la tête, sa partition trombone pour les Moddy Blues, alors que la rythmique est à Los Angeles, les trompettes et sax à Londres ! Parce que les Moody Blues voulaient les meilleurs! Le monteur fera le reste au mixage ! Le magazine tout entier ne suffirait pas à raconter André et ce qu’il appelle lui même, « la vie fabuleuse qu’il a connue ». Et si vous le croisez au village, n’hésitez pas à faire plus ample connaissance: comme les plus grands, il est d’une extrême simplicité. Et comme Casimir, d’une immense gentillesse!